Aller au contenu

[PPWC23] La pluralité dans un contexte plus large par Non2

Description de la session :

Aider à situer l’expérience de la pluralité dans un contexte plus large.
Pour ceux qui se soucient pour un avenir pour l’humanité.

Avertissements de contenu :

Mention de relation sexuelle, de consommation de substance, de décès brutal et de magie noire
Bruit surprenant (jump scare) à 19:37 (« carottes à la Jeanne »).

Transcription écrite :

Je suis très mauvais pour les salutations. C’est à dire, pour moi, ce que j’appelle des formules de politesse. Et pour moi, c’est des conventions. Et pour moi, des conventions, c’est des choses artificielles. Bon, ça sera peut-être plus clair plus tard. 

“Qui suis-je en utilisant les concepts de la communauté plurielle ?”

“Les explorations de ma partie Protecteur”

“Les rapports du Protecteur et/ou des autres parties”

“La non binarité : pas seulement concernant le genre, mais aussi en philosophie”

“Les étapes de ma prise de conscience de la pluralité”

“Synthèse, ma manière de percevoir la réalité, par six aspects”

Le titre d’ensemble de la présentation, c’est “La pluralité dans un contexte plus large”. On peut interpréter ce titre ou une interprétation de ce titre, c’est que le contexte plus large, c’est en fait moi. Je développerais progressivement les différentes dimensions de ce qui est moi. Moi étant, d’une certaine façon, l’incarnation du contexte plus large. Ce sera plus compréhensible après. [rires] En premier lieu, par rapport au vocabulaire de la communauté plurielle, je suis grosso modo, dans la catégorie OSDD (ATDS) ou autre manière d’être/avoir des problèmes d’identité. Mais ma manière d’être OSDD est encore particulière et je ne sais pas si elle est répertoriée dans les différents exemples d’être OSDD. Donc au lieu d’essayer de savoir dans quelle sous catégories d’OSDD je suis, je vais décrire comment ça fonctionne pour moi. D’abord, il n’y a pas de frontière entre les différentes parties. Je dis partie au lieu d’alter parce que justement il n’y a pas de frontière et un autre aspect du fait qu’il n’y a pas de frontière, c’est que contrairement à la plupart, je ne donne pas de noms différents aux différentes parties, parce que c’est des variations continues. Il n’y a pas de portes et il n’y a pas de verrou entre les différentes parties. C’est des glissements progressifs, mais ça glisse très loin. Donc entre mon identité à un moment et à un autre moment, les différences peuvent être énormes. Donc c’est manifestement multiple, mais il n’y a pas de frontière. Un aspect de ce glissement entre aussi des alter et des parties, c’est mon inner. La plupart des multiples ont un inner, donc un monde intérieur. Pendant longtemps je pensais que je n’en avais pas. Mais j’ai un peu révisé et je crois maintenant qu’en fait, j’ai un inner, mais il est essentiellement abstrait. Donc il ne comporte pas d’images, il n’a pas de représentation en trois dimensions, il n’a pas de représentation visuelle ou visuelle dans un sens extrêmement métaphorique, mais donc essentiellement le sens de la vision n’est pas concerné. C’est un monde essentiellement conceptuel. De même pour la mémoire, il y a dans certains états, j’ai du mal à accéder aux mémoires d’autres états, mais il n’y a pas de frontières fixes, ça dépend des circonstances, etc etc. Donc par exemple, j’ai souvent du mal à retrouver un mot quand j’en ai besoin. Un autre aspect qui n’est pas strictement pluriel, mais qui est très courant dans la communauté plurielle, c’est la question du genre. Et là, il y a différentes manières de voir, mais en gros, j’ai adopté la nomenclature non-binaire sur un fond assigné mâle à la naissance. Et un aspect de ça, c’est que récemment, à un âge relativement avancé, pendant deux ou trois ans, j’ai pris des bloqueurs de testostérone et des estrogènes. Pour l’instant, je n’en prend plus, mais les effets sont toujours assez présents. Bon, retournons aux identités. A part qu’elles n’ont pas de frontières très visibles, elles ont tendance à être plutôt abstraites par rapport à la plupart des multiples qui présentent leurs alters, etc. Mes parties sont plutôt dans la gamme, de plus en plus abstrait. C’est non seulement abstrait, mais elles chevauchent aussi la frontière entre individuel et collectif. Donc un certain nombre de mes identités sont, si on prend l’individu comme fondamental, sont des identités collectives. Mais évidemment, quand je suis dans l’identité collective, c’est ça mon identité, donc elle n’est pas collective, c’est par rapport à l’individu qu’elle est collective. 

[Question] “Qu’est ce que tu entends par identité collective ?” [non2] Une tradition culturelle ou par exemple, un individu peut avoir un genre, mais le genre, c’est pas un individu. Donc quand je centre mon attention et je m’identifie de plus en plus à un genre, c’est une identité collective dans cette manière de considérer les choses. Je prends ça pour donner des exemples pas trop abstraits, parce que beaucoup de mes identités sont plutôt d’ordre disons spirituel et donc c’est encore plus compliqué. Si je peux faire un aparté en utilisant d’autres catégories, le monde visuel mobilise certaines parties du cerveau qui sont spécialisées dans le sens de la vision. Le néocortex n’est pas spécialisé par rapport à un sens en particulier. Et une des manières dont je me suis décrit depuis très longtemps, c’est que je me suis réfugié dans mon néocortex. Et donc dans mon néocortex, je manipule des concepts abstraits parce que c’est ce que ce cortex fait. Il y a un aspect des nomenclatures multiples qui sont quand même d’applications. C’est-à-dire qu’il y a des modes et des spécialisations, des rôles, … Et en gros, la partie qui est en contrôle la plupart du temps et en tout cas en public, est dans la nomenclature plurielle, grosso modo, un protecteur. Et qu’est ce que le protecteur protège ? C’est mes émotions. Et les émotions (de nouveau, il n’y a pas de frontières fixes), mais en gros, sont liées à un stade d’évolution de l’ordre de 5 ans et sont liées à un traumatisme de cette période, 4 ou 5 ans. Et donc ce rôle de protecteur est donc relativement unifié et peut passer facilement comme un single. Ce single a comme caractéristique de ne pas avoir des relations difficiles avec ces émotions. Donc, une des manières de décrire ça, c’est d’être un peu dans le spectre autiste. Mais, de nouveau, ces variables dans des contextes relativement sécure, je peux exprimer de plus en plus d’émotions et à ce moment là, je m’anime et je peux m’exprimer de manière animée, ce que d’ordinaire, je ne fais pas. C’est une manière de montrer cet aspect est fluide, sans frontière. 

Je vais maintenant ajouter quelques éléments plus autobiographiques qui permettent de mieux comprendre les points que je viens de mentionner, de mes caractéristiques et aussi qui permettront de comprendre les points que je vais introduire par la suite, c’est-à-dire ma manière d’être ainsi, atypique. En gros, jusqu’à l’âge de 6 ans, j’ai vécu d’une manière fort atypique. Je vivais essentiellement dans une maison, ça, ce n’est pas original, mais j’en sortais très peu. Donc je ne fréquentais pas la rue, je ne fréquentais pas de voisins, je ne fréquentais personne en dehors de la maison. Je vivais essentiellement avec ma mère et ma sœur, sœur plus âgée de 4 ans et demi, par rapport à moi. J’avais un père, dont l’existence n’était pas cachée, mais qui était extrêmement peu présent et avec lequel je n’ai pas le souvenir d’avoir jamais eu une interaction interpersonnelle. Un symptôme de ça, c’est qu’une des premières fois que je l’ai mentionné dans mon propre discours, j’ai utilisé son nom, Armand et je n’ai pas dit mon père ou papa, etc. Donc c’est quand même assez particulier. Et donc il était parfois là, mais très peu et je n’avais pas d’interaction avec lui. A part ça, dans la même maison, il y avait aussi un bureau où des personnes travaillaient pour mon père. Et au rez-de-chaussée, il y avait une grande partie de la famille du côté de ma mère. Donc, ma grand-mère, pendant un certain temps mon grand-père maternel et deux tantes. Donc voilà, ça, c’était mon univers. Mon contact avec l’univers extérieur à cette maison, s’est passé essentiellement par la lecture de bandes dessinées. Donc, ma connaissance du monde extérieur, est avec comme intermédiaire, les bandes dessinées. Et ces bandes dessinées étaient les bandes dessinées de la période glorieuse, de la bande dessinée franco-belge, belgo-française, enfin comme on veut. Et donc, essentiellement, au début, Le Journal de Tintin, qui comporte Tintin, mais plein d’autres bandes dessinées. Après ça a été étendu, mais ça, c’est venu beaucoup plus tard. Donc c’était ça l’essentiel. Et après 6 ans à l’école en Suisse, ce qui a été l’occasion d’une transition assez significative, c’est-à-dire que jusqu’à ce moment-là, je parlais anversois qui est un dialecte du néerlandais. Et en allant à l’école, je suis passé au français. Pas français comme langue étrangère, mais français comme langue principale. Je ne me rappelle pas d’un effort particulier pour apprendre à parler en français. Le seul souvenir, c’est des cahiers didactiques avec des images et des mots montrant l’association des deux, c’est à peu près le seul souvenir que j’ai. Et en particulier, je n’ai aucun souvenir d’aucun autre élève de cette école. Zéro. Donc je n’ai pas dû avoir des relations très profondes avec d’autres élèves de cette école. Ce que j’avais oublié dire, c’est que dans cette maison, je n’ai jamais vu d’enfants, ni de mon âge, ni d’un âge inférieur. Donc mon statut était toujours d’être le petit et d’être l’unique petit. Donc je n’ai jamais appris à avoir des relations avec des enfants de mon âge. Donc, à l’école, comme vous n’avez pas appris, je ne l’ai pas fait, quoi. [rires] Comme ma mère était, disons, l’adulte de référence et le seul, les caractéristiques de ma mère sont relativement importantes et ma mère n’était pas très typique non plus. Entre autres, elle n’avait aucun attrait à être une ménagère. Et donc peu après, quand on n’était pas en Suisse, on habitait plutôt à l’hôtel, qui appartenait à mon père. Comme ça, elle n’avait pas à s’occuper de l’intendance et de la cuisine, qui étaient pour elle plutôt une corvée. Elle donnait elle-même l’exemple, la manière dont le reste de sa famille qualifiait ses qualités de cuisinière. Il y avait une expression célèbre, bon, je traduis en français “Des carottes à la Jeanne”, Jeanne étant le nom de ma mère et “Des carottes à la Jeanne”, c’est des carottes brûlées. Voilà, donc ça c’est la manière dont elle était dans ses qualités de cuisinière, elle était connue dans la famille. Quelque chose d’encore un peu plus particulier, c’est que ma mère ne m’a jamais transmis des règles de conduite abstraites. Mon éducation s’est faite évidemment en imitant les caractéristiques de ma mère et aussi de ma sœur. Mais je n’ai jamais eu ce que j’ai appris est la condition pratiquement universelle de la plupart des gens, d’avoir un conflit du type “fais ce que je dis et ne fais pas ce que je fais”. Comme elle ne disait rien, cette contradiction n’existait pas. Ça explique un certain nombre de mes caractéristiques par rapport aux autres et ma manière d’être atypique. De manière un peu ironique, j’explique parfois ça aux personnes que je rencontre en disant qu’on ne m’a pas appris à mentir, sauf par omission. Parce qu’elle ne donnait pas de principes, mais elle omettait aussi beaucoup d’éléments de la réalité. Une autre manière de ne pas être très conventionnelle, c’est que non seulement elle n’avait pas de principes, je vais donner l’exemple : Une des caractéristiques, c’est qu’elle avait une petite caméra 8mm et donc ce qui est totalement normal à l’époque actuelle, avec des vidéos qu’on prend avec son téléphone, à l’époque, était extrêmement rare. Avoir une caméra n’était pas tellement répandu. Et donc j’ai vu et ça a fait partie, d’une certaine façon, de mon éducation. Et elle avait fait des films de moi et de ma sœur. Et donc je donne l’exemple d’une séquence de film où elle filmait ma sœur. La situation, c’est qu’apparemment on venait de nettoyer une voiture et ma sœur était debout dans une grande bassine contenant l’eau avec laquelle on venait de nettoyer la voiture. Et elle, dansait dans cette bassine et à un moment donné, elle a pris l’éponge et a léché l’éponge. Voilà. Et donc le rôle de ma mère dans cette séquence, c’est elle qui filmait. Elle n’intervenait pas dans ce qui se déroulait et il était tout à fait clair pour elle, quand elle montrait cette séquence, que c’était très drôle. Le rôle parental était rempli d’une manière pas très standard. La plupart des parents seraient plutôt intervenus pour qu’elle ne fasse pas ce genre de choses, pas très courantes. Ma mère c’est : elle filme la scène. 

La deuxième partie, c’est les explorations des protecteurs. Donc je fonctionnais principalement comme un singlet, grosso modo, autiste, disons. Donc, j’avais peu de contact avec l’environnement et donc ma conception du monde extérieur, venait essentiellement par l’intermédiaire de bandes dessinées. Et c’est par là que j’ai développé un intérêt pour l’aviation, pour la science et pour certains aspects disons, fantastiques. A un moment donné, par mon intérêt pour l’aviation, j’ai vu une revue de vulgarisation science et vie qui parlait d’aviation et j’ai acheté ça. Et puis il y avait un autre numéro spécial sur l’astronautique et donc je me suis intéressé à ça. Et c’est là que j’ai rencontré la figure d’Einstein qui a été la première figure masculine, que j’ai estimée digne d’imitation. Ce qui a conduit que j’ai, enfin de compte, fait des études de physique. J’ai progressivement développé mon intérêt pour toutes les sciences et à partir d’un moment aussi, en partant du point de vue scientifique, à la parapsychologie, qui est la manière scientifique d’aborder les phénomènes un peu fantastiques. J’ai assez bien creusé ça, jusqu’au point de me convaincre que la parapsychologie correspondait à quelque chose de réel, ce qui n’est pas, en fait, le point de vue scientifique majoritaire, mais la conclusion que j’en avais tirée, c’est qu’à priori, tout est possible. Et alors, la question se posait si tout est possible, qu’est ce qui est désirable ? Et c’est alors que j’ai développé un intérêt pour, disons, les philosophies orientales. Et c’est dans un livre sur le yoga de Patañjali que j’ai découvert quelque chose qui allait me guider aussi. C’est que dans ce langage-là, ce qui correspond à la parapsychologie, sont qualifiés de Siddhi, les pouvoirs. Et il est dit explicitement que les pouvoirs apparaissent sur la voie spirituelle, mais sont une distraction, il ne faut pas se laisser hypnotiser par les pouvoirs, que c’est une distraction. Donc ça existe, mais c’est une distraction. Et j’ai, en gros, suivi ça comme conseil aussi. Progressivement, j’ai exploré d’autres sources d’information. Pendant longtemps, ma source principale, c’était le Scientific American qui, à l’époque, était une référence de vulgarisation de haut niveau. J’ai ainsi suivi le développement de toute une série de sciences qui, à l’heure actuelle, sont évidentes, mais qui, pour moi, étaient comme un feuilleton de bandes dessinées. La découverte du code génétique, c’est quelque chose que j’ai suivi au jour le jour. Le fait que la vie sur Terre est unique, qu’y a un ancêtre commun à toutes les formes de vie sur Terre, est une découverte dans ce sens-là. Ce n’était pas une évidence a priori. Donc tout ça, j’ai vécu comme un feuilleton se développant et donc c’est comme ça que j’ai abordé la science comme des découvertes qui viennent. Un des développements qui a guidé l’évolution de ma pensée, c’est que je suis entré en contact avec quelque chose qui s’appelait l’initiative planétaire pour le monde que nous choisissons. C’était une initiative qui avait clairement comme ambition de faire une consultation de la population de la planète pour savoir quel avenir elle voulait. C’était un peu utopiste, mais ça va, ça s’est fait. J’ai participé à ça. J’ai participé à des réunions de personnes au niveau belge et au niveau européen. Mais je suis arrivé assez vite à la conclusion que la méthode sélectionnée pour faire cette consultation, qui était les petits groupes qui délèguent à un délégué à un petit groupe au niveau supérieur et ainsi de suite. J’étais convaincu que ça ne marcherait pas, parce qu’en fait, chaque nouveau petit groupe repart de zéro, ne tient pas compte de ce qui a été fait avant. J’étais convaincu de ça et c’est ce qui est arrivé. Mais j’ai gardé et j’ai internalisé l’objectif de cette initiative, c’est à dire comment, par quels moyens est-ce-qu’il serait vraiment possible de demander à toute la population de la planète ce qu’elle veut ? Et c’est ce qui a conduit à que je me suis intéressé aux ordinateurs et que j’ai réfléchi à un programme qui permettrait de faire ça, avant que je ne connaisse l’existence d’Internet, en fait. Avec Internet, je me suis dit que bon, il y a bien quelqu’un qui saura ce que j’avais en tête, mais ce n’est jamais arrivé. Et donc ce qui s’est appelé des programmes sociaux n’ont jamais réalisé le genre de choses que j’avais envisagées. J’ai travaillé pendant une trentaine d’années à concevoir comment il faudrait faire, mais je suis arrivé à une conclusion que c’était trop dangereux dans l’environnement actuel et je suis passé à la philosophie. Il y a d’autres éléments qui ont développé ma manière de penser. C’est la lecture d’un livre de Dorothy Dinnerstein, The Mermaid and the Minotaur, mais qui expliquait la différence de psychologie moyenne entre les hommes et les femmes d’une manière, disons, constructive, pas en partant du fait que c’est différent et puis justifier les différences, non, en montrant qu’il y a des situations existentielles différentes qui expliquent que la psychologie est différente. Et ça aussi c’était important pour mon développement. Une autre influence, ça a été Korzybsky, avec son slogan “La carte n’est pas le territoire”. J’ai lu son livre Science and Sanity et ça m’a influencé. Il développe la nécessité de ce qu’il a lui-même explicité comme une logique non-binaire. Mais la manière dont il a développé cette logique non-binaire, finalement, ne m’a pas satisfait. Et son mouvement n’a pas donné de grands résultats. Mais j’ai continué à réfléchir à cette question de dépasser la logique binaire. Une autre influence a été un roman de science-fiction d’un certain Sheckley qui m’a introduit à la notion de déformation métaphorique. Et ce concept, bon, je vais le prendre tel que moi je l’ai pris et ça n’a pas d’importance comment lui l’a développé. C’est que quand on a un modèle dans la réalité et qu’on est confronté à des expériences qui sont en dehors du domaine de validité de ce modèle, on continue à percevoir des choses, mais à travers son modèle préférentiel. Mais ça donne des déformations qui peuvent devenir de plus en plus aberrantes. Et c’est cette notion de déformation métaphorique est devenue très importante dans ma manière de percevoir d’une part les choses et comment des personnes différentes peuvent percevoir des choses. Encore une influence, a été une amitié d’un grand nombre d’années avec une personne qui était un mathématicien et qui développait une manière assez particulière de voir les choses. Il était convaincu qu’il était une machine et qu’en fait tout le monde était une machine, que l’univers était en fait une machine. Mais il m’a aussi introduit à des mathématiques qui sont moins connues. En gros, tout ça est lié au théorème de Gödel sur la logique, etc. Mais aussi, il m’a introduit à, en mathématiques, ce qui s’appelle la théorie des catégories, qui est moins connue que la théorie ensembles qui est beaucoup plus connue. Mais la théorie des catégories a été inventée par des mathématiciens pour surmonter les problèmes de la théorie des ensembles. Parce que la théorie des ensembles, avec le théorème de Gödel, a montré ses limites pour servir comme fondement des mathématiques. Donc voilà, ça c’est les principales sources d’inspiration que j’ai eues et que je développerai après, dans une synthèse de comment j’ai mis tout ça ensemble. 

Je vais maintenant passer à la troisième partie qui est les relations avec le corps. Ma relation au corps a toujours été un problème pour moi. Comme je l’ai dit, j’ai une tendance plutôt autiste, j’ai participé à des réunions de personnes autistes et j’ai vraiment beaucoup de points de similitude. Pour donner un exemple de relations problématiques avec mon corps, j’ai le souvenir d’une expérience, à l’âge d’environ neuf ans, où marchant seul dans un couloir, dans une école. Je me suis rendu compte qu’en fait, quand je marchais, il y avait mes jambes qui bougeaient, etc, c’est-à-dire qu’au lieu d’avoir ma conscience qui traversait et qui utilisait son corps, qu’en fait, il y a vraiment des membres de mon corps qui faisaient le travail. C’est peut être difficile à faire comprendre, mais le fait est que c’était une révélation. [rires] Donc c’est à un niveau de prendre conscience de mon corps. Donc, c’est à la fois de monter la distance habituelle et le choc d’en prendre conscience. Donc ça, c’est un premier indice de la difficulté. J’en ai eu d’autres, mais la manière de surmonter ce problème, la première grosse avancée a été par 39:18 TW Substances la consommation de cannabis, qui a permis que j’entre en contact avec mon corps d’une manière différente. En fait, le cannabis a pour moi 2 effets différents. Il me permet d’aller plus loin dans mes explorations, disons mentales. Mais il me permet aussi d’aller dans l’autre sens et de prendre contact avec mon corps. Et ça a été une révélation. J’ai par la suite développé, en partant d’une méthode que j’ai découvert dans un livre, des méthodes de relaxation et de méditation, essentiellement couché. Et ça va faire que j’ai développé une pratique assez particulière d’être dans des états intermédiaires entre l’état de veille et l’état de sommeil. J’ai beaucoup étudié mes rêves. Pendant toute une période, j’ai noté mes rêves et c’est ainsi qu’une des choses que j’ai faites, c’est d’atteindre spontanément des rêves lucides. Ce qui a aussi contribué à ma manière de voir la réalité. À un moment donné, j’ai quand même voulu aller plus loin dans mon contact avec mon corps et j’ai eu l’idée qu’un corps féminin est plus sensible qu’un corps masculin. Et donc j’ai pris des bloqueurs de testostérone et des estrogènes pour explorer ça. Avec ça, je suis dans le milieu trans, j’ai développé, disons, j’ai trouvé l’étiquette qui me convenait le mieux, comme étant non-binaire et j’ai développé progressivement un intérêt pour le concept non-binaire et qui m’a fait raccrocher le travail que j’avais commencé à faire avec Korzybsky et la logique non-binaire. La non-binarité, j’ai donc essayé de comprendre l’origine de la logique binaire, pour comprendre comment arriver à une logique binaire. Et donc j’ai trouvé des auteurs qui ont écrit sur l’origine, dans quel contexte, la logique binaire est née. Cette origine est donc dans la Grèce antique, c’est les débuts de la philosophie grecque. Par la même occasion, je me suis intéressé au début de la philosophie grecque, elle est née, en gros avec Thalès, qui est connu avec le théorème de Thalès, mais qui en fait est d’une certaine façon le premier philosophe grec. Le contexte dans lequel ça s’est développé est assez particulier et c’est peut être un peu moins connu. C’est que la Grèce a connu une crise sociale assez fondamentale. C’est une des premières sociétés qui est passée à une économie pleinement monétaire, avec des pièces de monnaie pour tous les types de transactions. Et cette transition a été relativement brutale par rapport à une société qui était avec des divinités. Et donc il y a eu un choc entre ce qui faisait fonctionner pratiquement la société et les relations sociales, c’est-à-dire des relations monétaires et une conception de l’univers avec des divinités qui réglaient les affaires des Hommes. Et c’est ça, en gros, le contexte de la philosophie grecque, c’est des personnes qui se sont demandé comment ça fonctionne vraiment, autrement que par référence directe à la volonté des dieux. Et le modèle qui a été pris pour comprendre les choses, a en fait été la géométrie. Donc Thalès à introduit la géométrie aussi en Grèce et c’est devenu le modèle, parce que la géométrie était une source de connaissance qui n’avait pas besoin de dieux comme source de la connaissance. On pouvait manipuler logiquement des éléments et arriver à une conclusion et donc avoir une source de connaissance indépendamment des dieux. Après Thalès, il y a eu plusieurs philosophes essayant de structurer ce type de connaissances. Il y en a un qui est proche de ma manière de voir les choses, qui est Héraclite. Et Héraclite disait “Tout change”. Donc il n’y a pas de choses fixes. Une des métaphores que Héraclite utilise pour montrer ça, c’est qu’il y a des choses particulières, mais elles ne durent pas et elles se transforment dans une autre, etc. Et il prend explicitement comme métaphore ce qui se passe entre des échanges monétaires. Il dit comme l’or, il y a des choses particulières qu’on peut acheter en échange d’or et avec l’or, on peut acheter n’importe quoi. Donc il y a quelque chose qui permet de faire communiquer tout avec les autres, mais les formes particulières changent. Donc la référence à l’or est explicite dedans. Malheureusement, de mon point de vue, Héraclite n’est pas celui qui a eu le plus d’influence. C’est plutôt Platon. Et Platon a transmis le point de vue de Parménide qui a, lui, introduit la logique binaire. Où il disait “Ou bien quelque chose est ou bien elle ne l’est pas/elle n’est pas” et il n’y a pas de troisième possibilité. C’est l’introduction du tiers exclu qui est le fondement de la logique, dite classique, mais qui est donc la logique binaire. Une expression ou bien elle est vraie ou bien elle est fausse. Il n’y a pas d’autre possibilité. Et donc c’est le début de la logique binaire. Donc l’origine, en gros, c’est Parménide autant que je sache. Et transmis ensuite par Platon. Et formalisé par Aristote. J’ai longtemps pensé que Aristote était le grand responsable, parce qu’il a formalisé ça, le tiers exclu, etc, c’est formalisé par Aristote. Mais Aristote est plus ambigu parce qu’il présentait la logique comme étant ce qu’il faut faire pour la logique déductive, quand on parle de choses vraies. Donc c’est un mode de propagation de la vérité. Mais il parlait aussi de la logique inductive et dans ce cas là, ce n’est pas vraiment la logique binaire qui est en avant. Mais cette influence là, cet aspect là d’Aristote n’a pas été développé, de mon point de vue, par le fait du développement du christianisme. Le christianisme a une tradition juive, donc c’est une variante de la religion juive, au départ. Mais le développement du christianisme s’est fait par saint Paul qui en fait était un citoyen romain et c’est lui qui a universalisé le christianisme. Au lieu d’être une variante juive, c’est devenu la religion universelle. Et il a importé la philosophie grecque dans ce même mouvement. Et donc la théologie chrétienne a importé les concepts philosophiques grecs et entre autres, Aristote. Mais comme les chrétiens étaient dépositaires de la vérité, la seule chose intéressante était la logique déductive puisqu’ils avaient la vérité, c’est comment développer la vérité. Le problème de l’induction, comment trouver la vérité, c’était pas important, ils l’ont déjà. Donc c’est ça qui explique que c’est ce côté là d’Aristote qui a été le plus transmis. Et la raison pour laquelle Korzybski a appelé ça la logique non aristotélicienne. C’est bien Aristote, mais Aristote ne parlait pas que de ça. C’est donc l’explication de comment c’est arrivé. Maintenant, qu’est ce que moi je propose comme alternative ? Parce que l’alternative proposée par Korzybski, pour moi, ne convient pas. Mon alternative n’est pas très répandue, parce que la plupart des alternatives, c’est de dire “On va ne pas exclure le tiers”. Et donc on a la vérité, on a le faux et puis on a des choses intermédiaires. C’est en général ça qui est fait. Ma manière est différente. Ma manière, c’est de dire “Le problème, c’est la notion de vérité, c’est la vérité qui est le problème”. Et là, je retourne en arrière sur l’origine grecque, au départ. C’est le nom de “Vérité”. En grec, c’est “aléthéia”. Et donc “aléthéia”, c’est une construction standard avec un a privatif. Le a privatif de “léthéia” et “léthéia”, c’est l’oubli. Donc “aléthéia”, c’est le “désoubli”. Et la manière dont cette signification fonctionnait dans la langue grecque avant Parménide, c’était en gros ce qui était révélé par les dieux. Donc les dieux révélaient ce que les Hommes avaient tendance à oublier. C’était le “désoubli” et donc les dieux transmettaient des connaissances pour que les Hommes n’oublient pas, l’aléthéia. Donc c’est une espèce de révélation. Et c’est ce terme là qui a été utilisé pour désigner la vérité dans le sens vérité binaire. Et donc c’est un détournement de sens, de mon point de vue, parce que je dois expliquer une autre partie, c’est que la géométrie et pour ça je tiens compte de l’histoire des mathématiques dont j’ai parlé avec le développement du théorème de Gödel, etc, c’est que avec Gödel, on est arrivé à la conclusion que toutes ces formes de mathématiques, c’est ce qu’on appelle des systèmes formels où on part de postulats qui sont présumés vrais et on en déduit toutes les autres vérités qu’on peut en déduire en utilisant la logique binaire. Le problème était, ça date du début du XXᵉ siècle, c’était comment est ce qu’on peut justifier les postulats de départ ? Donc c’était le problème du fondement des mathématiques. Comment justifier le postulat de départ ? Et c’est ce programme là qui a été terminé par Gödel en disant “Il n’y a pas moyen de prouver ça”. Et donc, en gros, tout système formel, plus compliqué que l’arithmétique élémentaire, introduit des propositions qui sont indécidables et on ne peut pas dire que c’est vrai ou c’est faux, c’est indécidable. Et donc, pour moi, la manière “logique”, avec quelques guillemets, c’est de dire que bon, la vérité formelle est une notion qui n’a de sens qu’à l’intérieur d’un système formel. Et on ne peut pas justifier un système formel par un fondement qu’il fallait qu’il soit justifié. Avec je tombe donc sur Korzybski qui est “La carte n’est pas le territoire” et que tout système formel est en fait une carte. Mais j’ajoute, c’est pas une contradiction avec Korzybski, c’est que donc la carte n’est pas le territoire, mais les cartes sont utiles. Si on n’a pas de carte du tout, on est dans le brouillage total, c’est-à-dire qu’on ne sait rien. Pour avoir une connaissance, il faut un minimum de structures et donc on a besoin d’une carte. Et si on veut que cette carte soit consistante, alors on utilise la logique pour faire une carte consistante. Donc c’est bien de faire des cartes, il faut simplement savoir qu’il n’y a aucune carte qui peut de manière légitime prétendre à être la vérité. C’est une carte et on évalue une carte par son utilité. Et donc, qu’est ce qui peut remplacer la logique binaire ? Et là, d’une certaine façon, je n’ai rien inventé. En fait, je remplace la logique binaire par la logique effective du développement des sciences. Ce n’est pas très connu non plus, étant donné que la manière dont les sciences sont en général diffusées sont par les résultats déjà obtenus par la science. Donc, ce que la science a produit comme modèle, qui est le meilleur modèle qu’on a vu jusqu’à présent. Et ces modèles sont des systèmes formels, où la logique binaire fonctionne à l’intérieur du modèle. Et pour faire comprendre la science, on l’enseigne avec les modèles formels créés par la science et donc ainsi par le bord, on attrape l’illusion que la science utilise essentiellement et uniquement la logique formelle, mais ce n’est pas le cas. Le processus de découverte des théories scientifiques, c’est une démarche inductive pour prendre la catégorie d’Aristote. Et donc là, la logique inductive, ce n’est pas la logique binaire qui est utilisée. Et donc, en étudiant la philosophie des sciences et l’histoire des sciences, on peut voir quelle est la logique effective des découvertes scientifiques, des découvertes par des modèles. Et la logique là dedans, c’est qu’on crée des modèles. Un modèle est un système formel. Ensuite, on développe toutes les conséquences du système formel et on compare avec l’expérience. Donc, la comparaison avec l’expérience, c’est le fondement de la science expérimentale, c’est ça le fondement. Et la partie intéressante, c’est dans quelle zone est ce que le système formel ne prédit pas ce que l’expérience montre, ce qu’on peut mesurer avec l’expérience. C’est un travail créatif de développer un autre modèle qui permet de mieux correspondre à l’expérience. Tout modèle scientifique, pour la méthode scientifique, n’est pas considéré comme la vérité, mais comme étant la meilleure approximation dont on dispose jusqu’à présent. Et donc, je propose de prendre ça comme substitut à la notion de vérité dans la logique binaire, c’est-à-dire le meilleur modèle dont on dispose sur le moment, la meilleure approximation. Mais de dire que c’est la vérité, ça, ce serait dire “On arrête la science, on ne bouge plus. S’il y a une différence avec les expériences, ça ne nous intéresse pas. On va négliger ça parce que nous, on a la vérité”. Ça, ce n’est pas la méthode scientifique. Ça, c’est à la limite ce qu’on peut appeler, ce que moi j’appelle “le scientisme”, c’est de dire “L’état actuel de la science, maintenant, maintenant, maintenant, exprime tout ce qu’il y a moyen de savoir sur l’univers. Tout ce qui n’est pas modélisé par le modèle actuel n’existe pas et ne peut pas exister et n’a pas le droit d’exister”. Ça c’est le scientisme et donc pour moi, je dis, le scientisme est un ennemi majeur de la science. Mais heureusement, les vrais scientifiques ne sont pas des scientistes et ils continuent à chercher des meilleurs modèles. Donc simplement moi j’adopte, comme substitut à la logique binaire, la logique utilisée par la découverte scientifique. Pour donner un petit ajout, c’est donc la meilleure approximation, mais j’ajoute “pour une situation dans un contexte donné et dans un but donné”. Ca c’est pour permettre de généraliser à d’autres manières de percevoir la réalité que la méthode scientifique. Donc, généralise la dynamique des découvertes scientifiques à tout mode de connaissance. Et c’est ça que j’utilise comme manière de rendre possible un dialogue entre des traditions intellectuelles qui sinon sont a priori incompatibles et principalement entre la tradition scientifique et les traditions spirituelles et/ou religieuses. Pour moi, les traditions religieuses, c’est juste une variante sociologique d’une tradition spirituelle. Et c’est ça que je fais, c’est une manière de mes d’expliquer ce que je fais, c’est que j’utilise deux yeux. J’ai un oeil scientifique et j’ai un oeil spirituel et je vois beaucoup de borgnes qui utilisent soit l’oeil scientifique, soit l’oeil spirituel, mais qui ne parviennent pas à ouvrir les deux yeux en même temps, parce que ça interfère avec le fait que ce qu’ils voient avec un œil est la vérité. Et donc la perturbation d’avoir l’autre oeil qui dit “C’est pas toute la vérité, c’est juste une approximation”. Et donc ça c’est mon aventure, c’est d’essayer de voir le monde avec les yeux ouverts. 

La partie cinq, c’est donc ma prise de conscience de la pluralité. Pour faire le raccord avec la partie précédente, c’est que, avec cette conception de l’approximation et des points de vue différents, il est donc conseillé d’avoir plusieurs points de vue différents. J’ai dit deux yeux, mais en fait, on peut- Plus on a de points de vue différents, mieux ça vaut. Donc on n’est pas limité à deux, donc c’est la pluralité. Comment est ce que dans ma biographie, j’ai pris conscience de ma propre pluralité ? Il y a eu des signes avant-coureurs. Par exemple, j’ai à un moment donné fait un stage qu’on appelle d’expression corporelle et j’étais déjà conscient d’avoir une partie féminine et j’avais rencontré une personne et après, en revoyant cette personne, avec laquelle j’avais fait certain intérêt, elle m’a dit “Désolée, mais je préfère avoir une relation avec une personne qui est en un seul morceau”. Donc d’autres personnes voyaient déjà la multiplicité, disons. Donc c’est pour ça que je peux le dire, c’est un souvenir venant d’une interaction, donc il y avait bien, ici… Mais sinon, le fait que la pluralité, pour moi, est devenue quelque chose à laquelle je ne pouvais pas échapper, a été ma relation avec la seule femme avec laquelle j’ai eu une relation de couple pendant quelques années. Bon, j’explique un tout petit peu le contexte pour montrer pourquoi cela a été un choc. Anne était philosophe et une féministe convaincue et militante, ce qui pour moi n’était pas un problème parce que j’étais féministe moi même, donc que ce n’était pas ça le problème. Les problèmes qu’il y a eu entre nous ont été dû essentiellement à des problèmes sexuels. A posteriori, c’était lié à mon problème de contact avec mon corps et a posteriori, mon diagnostic, c’était que c’est difficile d’avoir des relations sexuelles quand on n’a pas de corps ou quand on a un rapport très difficile avec son corps. Et donc ça, c’est mon diagnostic de la raison pour laquelle ça n’a pas très bien fonctionné en tant que couple. Quelques autres caractéristiques d’Anne, elle était féministe convaincue, mais aussi assez aventurière. Quand je l’ai connue, elle avait déjà fait un voyage seule en Amérique du Sud. Quand je l’ai connue, elle était en train de préparer un deuxième voyage vers l’Inde, en voiture. C’est à ce moment-là que je l’ai connue. Elle a fait ce voyage. En tout cas, elle est arrivée jusqu’à l’Afghanistan en traversant l’Iran. À l’époque, c’était en 1970 à peu près et donc, à l’époque, tous ces pays étaient totalement accessibles sans problème. L’Afghanistan était néanmoins un Afghanistan tribal et elle voyageait là dedans, toute seule dans sa deux chevaux. Et une des anecdotes qu’elle m’a raconté, c’est qu’à un moment donné, elle voyait un lac ou un étang et elle est allée se baigner dans le lac. Et alors elle a vu sur la rive arriver une bande d’Afghans, en disant “Vous devez pas faire ça”. Mais ils lui ont rien fait, elle s’est rhabillée et elle a pris sa deux chevaux. Donc c’est pour dire qu’elle n’avait pas vraiment froid aux yeux. Une autre anecdote, c’est qu’elle a rencontré un des chefs tribaux dans une des vallées d’Afghanistan et ce chef lui a proposé de devenir sa femme. Et elle a refusé en disant “Je ne n’accepte pas comment vous traitez vos femmes”, mais c’est quand même une citation assez particulière. Donc après, elle est revenue de son voyage. Et après ça, on s’est mis en couple, on a habité une maison, etc etc. Et puis on s’est séparé en tant que couple et pendant qu’on était là, elle préparait son voyage suivant, en fait. Toujours est-il que, à un moment donné, on correspondait, on s’envoyait des lettres, parce qu’on était toujours- On s’était séparé en tant que couple, mais on était toujours les meilleurs amis, quoi. Elle était à Bali et là, elle m’a envoyé une lettre où elle expliquait que, à Bali, elle s’était retrouvée dans un contexte de magie noire, mais donc magie noire vécue en direct. Donc on ne peut pas penser tout ce qu’on veut de la magie noire, mais une personne qui se trouve dans une réalité de ce type là, ce n’est pas anodin. Et donc elle a attrapé peur et il a pris le premier avion pour quitter Bali, sans choix dans la destination. Donc, elle est arrivée quelque part, je crois que c’était en Thaïlande et donc là, elle m’a demandé de la rejoindre pour l’aider. Elle expliquait que pendant le trajet en avion, elle basculait entre deux états de conscience, l’un où elle vivait dans ce monde de magie noire et l’autre où elle avait atrocement mal à la tête. Et son projet, une fois qu’elle était en Thaïlande, c’était d’aller à Auroville pour rencontrer Mère (Mirra Alfassa), qui était la compagne spirituelle d’Aurobindo et qui avait fondé Auroville, qui est encore un projet de ville un peu au nord de Pondichéry. Elle me proposait de la rejoindre là. J’ai pris l’avion et je suis arrivé finalement à Auroville. Mais entre-temps, elle avait déjà été rejointe par un de ses amants précédents. Une des particularités, c’est qu’elle avait beaucoup d’amants, mais elle avait des bonnes relations avec tous ses amants précédents. Tous ses anciens amants étaient des amis. Elle avait plus ou moins repris une vie de couple avec cet ancien amant là. Et donc mon contact avec elle était un peu limité de ce fait là. Mais malheureusement, Mère ne donnait plus de rendez-vous particuliers. Elle était déjà très âgée et en mauvais état, elle ne donnait plus. Donc ça c’était raté pour elle et donc je ne sais plus exactement pourquoi… Oui, entre autres parce que c’est les saisons et il y a le mode traditionnel de vie des occidentaux en Inde, en tout cas depuis la colonisation anglaise, c’est que quand ça devient trop chaud à un endroit, on va dans le nord. Et donc on a fait un voyage pour arriver dans l’Himachal Pradesh, dans la Kullu vallée, qui est une partie de l’Inde qui a comme caractéristique d’être le point d’entrée 1:12:41 TW Substances de la culture du cannabis en Inde et donc le cannabis dans la Kullu vallée est une plante endémique, elle ne vient pas de là, elle vient de quelque part au sud de la Chine, mais elle a été propagée il y a longtemps dans cette vallée là et donc il y a une longue tradition de culture et de consommation de cannabis dans cette vallée. On a consommé du cannabis sous la forme locale. Mais l’événement, c’est dans un contexte où l’on consommait bien du bon cannabis, disons. Un troisième homme est arrivé, ce que j’appelle le troisième homme, que j’avais rencontré avant de partir en voyage et que j’avais rencontré avec le deuxième homme, avec lequel elle était en couple à ce moment-là. Donc, à ce moment-là, on était dans une cabane louée sur les hauteurs de cette ville et on était à quatre dedans, Anne et trois hommes. Et à un moment donné, elle a eu des relations sexuelles avec le troisième homme. Et juste après ça, elle est apparue avec une personnalité totalement transformée. Donc elle s’est présentée en tant que prenant rôle d’une femme soumise à un homme supérieur. Donc, par rapport à ce que j’avais connu et j’ai raconté toutes les caractéristiques qui faisaient qu’elle était une féministe convaincue, c’était 180°. Après ça, on est redescendu, on est allé à Delhi et sur le trajet elle a progressivement repris sa personnalité habituelle. Et à Delhi, il y a eu une discussion où elle expliquait sa position plus ou moins et elle se positionnait par rapport aux trois hommes en présence. Et là, il y a eu un mouvement du troisième homme qui a essayé de reprendre un peu, de réinstaurer sa position, disons. Elle est sortie de la pièce, le troisième homme l’a suivie et la seule chose que je sais, 1:15:37 TW décès c’est qu’après ça, elle avait sauté du balcon. Et elle s’est retrouvée là, elle était encore consciente, elle a juste eu le temps de dire qu’elle allait très mal. Le deuxième homme est allé avec elle à l’hôpital, parce qu’un seul pouvait accompagner. Et quand elle est revenue, elle était morte. Donc cette séquence, de voir quelqu’un avoir une personnalité totalement opposée et puis de revenir. Et de plus le fait qu’elle est morte après que je n’ai pas pu digérer ce contraste, a fait que pour moi, cette double personnalité, pour moi, était- je pouvais pas échapper à ça. Je pouvais pas faire comme si ça n’existait pas. Mais d’autre part, ça faisait que je ne pouvais plus percevoir quelqu’un d’autre de la manière dont il se présentait, sans tenir compte du fait qu’il y avait probablement des parties inconscientes quelque part. Et donc, pour moi, entrer en relation avec quelqu’un était devenu extrêmement difficile, parce que je devais connaître la personne vraiment, vraiment, vraiment bien, avant d’oser entrer en relation avec elle. Après ça, j’ai rencontré une autre personne qui, pour moi, avait comme intérêt, c’est qu’elle manifestait ou en tout cas elle expliquait sa manière de vivre, son expérience ou je reconnaissais des états qui, dans les traditions spirituelles, sont parmi les stades les plus élevés d’évolution spirituelle. Mais elle avait aussi des problèmes. Elle avait des revenus en tant qu’handicapée pour raisons psychologiques, etc. C’est le seul moyen qu’elle avait trouvé de survivre, parce qu’elle ne parvenait plus à travailler. Elle avait travaillé, mais elle n’y arrivait plus. Et donc elle avait ce statut là. Donc, elle était aussi clairement- Elle ne cachait pas avoir des problèmes, qu’elle avait fait un passage en hôpital psychiatrique, etc. Tout ça, elle ne cachait pas. Mais j’étais intéressé par elle à cause de ce développement spirituel. Le problème est arrivé lorsque j’ai un peu creusé dans ce qu’elle a raconté, à un moment donné, ça a déclenché quelque chose et il y a une personnalité alternative qui s’est présentée à moi. Personnalité vraiment pas très agréable. [rires] Pour clarifier, pour faire la connexion avec ce qui était précédent. Elle racontait qu’en fait, sa mère et sa belle mère faisaient de la magie noire et qu’elle avait refusé cet héritage. Mais la personnalité alternative était, de mon point de vue, grosso modo, la personnalité de sa mère. Cette personnalité m’a déclaré, de manière tout à fait explicite “La haine est un sentiment noble”, alors que la personnalité habituelle disait “Tout sauf la haine”. Donc l’autre personnalité, “La haine est un sentiment noble”. Par après, j’ai essayé de faire communiquer ces deux faces et je ne suis pas arrivé. Chaque fois que j’essayais d’aborder le sujet, l’autre personnalité prenait le devant et disait “Tu m’as mis dans cet état, maintenant tu te débrouilles avec”. L’apparition de cette personnalité était brutale, mais sa disparition était progressive. Et dans une de ces phases de disparition, elle m’a dit “La seule manière de vivre avec cette personnalité là, c’est de faire comme si elle n’existait pas. Alors elle te laisse en paix”. C’est ce que j’ai plus ou moins fait. Sauf que de temps en temps, j’essayais d’avancer un peu quoi. Au moment de sa mort, elle en était au stade de dire “Peut-être que j’ai dit ça, mais tu as dû mal comprendre”. Donc ça, c’est pour dire pourquoi la pluralité est pour moi très importante, même si moi, en tant que pluriel, mes symptômes sont beaucoup moins apparents. Je peux fonctionner comme single relativement bien dans la plupart des circonstances. L’autre élément, c’est la lecture du livre de Billy Milligan qui s’appelle les 24 vies de Billy Milligan, qui a été écrit par un auteur de science-fiction que je connaissais, Keyes, qui est un très bon auteur de science-fiction. Mais il a interviewé Billy Milligan et il a écrit un livre racontant l’histoire de Billy Milligan. C’est là que j’ai vu une description d’une personne multiple telle que c’est vécu de l’intérieur. Pour moi, ça a été d’une part révélateur, mais aussi ce qui était pas évident, c’est pas dans le livre, j’ai fait la généralisation en disant que ça, c’est un cas spectaculaire, avec des personnalités strictement séparées, sans mémoire commune. J’ai un cas moins spectaculaire ou simplement les mémoires sont un peu variables, mais pas totalement séparées. Mais j’ai fait l’hypothèse qu’en fait tout le monde est d’une certaine façon personnalité multiple. Simplement, pour la plupart des personnes, la personnalité d’avant-plan est capable de gérer la plupart des situations auxquelles elle est confrontée. Et tout ce qui n’est pas là dedans est mis dans l’inconscient. Et donc, il n’y a que deux catégories. Il y a le conscient et il y a l’inconscient. Mais la plupart des personnes, mises dans un contexte en dehors de leur zone de confort, peuvent manifester des choses qui ressemblent à des personnalités multiples. Et une de mes manières de rendre ça compréhensible, c’est que dans les cultures occidentales, une des manières socialement admises d’avoir des personnalités multiple est la consommation d’alcool, il est socialement admis, qu’une fois qu’on a consommé de l’alcool, on ne se comporte pas de la même manière. On fait des choses qu’on ne ferait jamais si on n’a pas consommé d’alcool. Donc pour moi, c’est simplement dans notre culture. C’est une des soupapes de sûreté, pour survivre en faisant semblant de ne pas être en personnalité multiple. Mais quand en fait, non, tout le monde est en personnalité multiple. Si on cherche assez loin. Et comme moi, j’ai tendance à chercher très loin, pour moi, c’est tout le monde qui est en personnalité multiple. Mais il y a des personnes qui parviennent à survivre dans des circonstances plus ou moins normales, sans trop de problèmes. Mais c’est aussi le fait que ces personnes ont tendance à vouloir empêcher les autres de sortir de leur zone de confort et donc c’est des personnes qui ont tendance à vouloir contrôler la vie des autres pour qu’elles mêmes soient dans leur propre zone de confort. Et donc c’est le problème, de mon point de vue. C’est donc là une des raisons pour lesquelles la communauté plurielle est pour moi une des communautés dans laquelle je me sens le plus à l’aise. Parce qu’il y a une acceptation qu’on ne maitrise pas tout et qu’il y a des zones qu’on contrôle pas, etc etc. Et que c’est admis qu’on contrôle pas, on vit avec. Et donc pour moi c’est ça, on vit avec. Et pour moi, toute la société est comme ça et la réalité est comme ça, c’est pluriel et il faut vivre avec. Et donc c’est comment vivre mieux avec ça ? 

Bon, la synthèse de comment j’entrevois de vivre avec la multiplicité à tous les niveaux dans l’univers est un sujet relativement vaste et que je ferai dans une vidéo en anglais. Je vais juste donner les différentes rubriques par lesquelles je passerai dans cette vidéo en anglais. Il y aura de toute façon une traduction en texte en français. Le premier aspect que j’aborderai, c’est les processus. C’est à dire que, en philosophie, actuellement, il y a une catégorie de philosophie qu’on appelle philosophie du processus. Et en gros, mon approche s’inscrit là dedans. Mais, comme processus que je prendrai comme fil rouge pour parcourir les processus, je vais aborder une notion plus particulière qui est la sélection naturelle, telle qu’elle a été introduite par Darwin. Mais je présenterai ma manière à moi, qui n’est pas exactement celle de Darwin. Et je proposerai aussi une version généralisée qui s’applique à tout, même à ce qui n’est pas des organismes vivants. La deuxième aspect que j’aborderai, c’est une ligne du temps, vue de cette manière là, mais la ligne du temps est faite en utilisant la perspective offerte par le point de vue scientifique actuel. Donc je m’inscris dans une perspective particulière, le point de vue scientifique actuel, pour donner une ligne de temps du développement de l’univers, dans cette perspective là. Donc, à partir de, grosso modo, ce qu’on appelle Big Bang, jusqu’à la période actuelle. Mais, je me concentrerai surtout sur la partie vie sur Terre et la partie humanité sur Terre. Donc, il y a tout, mais ça sera surtout concentré là dedans. Et j’aboutis donc, dans cette ligne du temps, à l’émergence et le développement actuel, du point de vue scientifique. C’est mon point de départ et c’est mon point d’arrivée dans cette séquence-là. Dans la partie trois, je vais examiner les modèles parce que maintenant, je considère le point de vue scientifique comme un des modèles possibles et je prends les modèles de manière plus générale. Et je reprends un peu plus en détail les modèles utilisés par les humains actuellement. Et donc le premier modèle, c’est le modèle fourni par le corps et plus particulièrement fourni par le système nerveux et par le système nerveux central : le cerveau. Quand je dis modèle fourni par le cerveau, je rappelle que pour une grande partie des personnes qui se disent être dans la perspective scientifique, la conscience est une propriété uniquement liée au fonctionnement du cerveau. Donc prendre ça comme un modèle n’est pas arbitraire de ce point de vue là. Autre modèle, c’est le langage. Le langage fournit une modélisation de la réalité. J’expliquerai un peu comment fonctionne le langage et comment, quelles sont les particularités et les limites du langage en tant que modèle. Puis je passerai au modèle des mathématiques. Quels sont les avantages et les inconvénients des mathématiques en tant que modèle ? Puis je passerai à la physique, en tant que modèle. Et quels sont les avantages et les inconvénients de la physique dans son état actuel ? Et je laisserai entrevoir quelques perspectives de comment généraliser ce modèle. Ce qui m’amène à la partie quatre où la manière dont je généralise, c’est en prenant les relations comme étant une dimension première pour aborder la réalité, donc les relations comme modèles de base, si on veut. Là, pour donner un tout petit exemple, c’est que ça fait partie des philosophies du processus. C’est que la philosophie du processus est un peu en contre partie des modèles qui considèrent qu’il y a des essences. Et que quand on parle de quelque chose, on va jusqu’à trouver l’essence de cette chose. En relation à un processus, on parle de comment cette chose entre en relation avec tout le reste. Donc c’est la relation qui est première. Le cinquième point de vue, c’est ce que j’appelle “Apeiron”. Je l’appelle Apeiron, parce que c’est la formulation que je trouve la plus claire de comment désigner le concept le plus inclusif possible. Apeiron, c’est donc le a privatif de Peiron. C’est le sans périphérie, le sans limite, et c’est le concept introduit par Anaximandre. Bon, tous ces concepts, il y a des antécédents dans les philosophies orientales, etc. Le sixième point de vue, c’est l’émergence en tant que processus. Voir plus en particulier ce que j’ai déjà développé dans la ligne du temps, etc. C’est quand pour la première fois un type d’entité, un type de phénomènes apparaît pour la première fois. Comment ça se passe ? Qu’est ce que c’est qu’un processus d’émergence ? Bon pour ne pas cacher les choses, mon hypothèse, c’est que nous sommes dans une phase d’émergence de ce qui s’appelle la Noosphere, qui est un concept disons popularisé par Teilhard de Chardin, mais qui n’est pas limité à lui. Le septième point de vue, c’est la notion de qualité. Si on prend la relation comme première, c’est, est ce qu’il y a moyen d’avoir des relations de meilleure qualité ? Et donc, étant donné tout ce qui précède, c’est en fait comment avoir des relations de meilleure qualité entre êtres conscients. Et je retombe là sur un concept bouddhiste, c’est les sentient being. Le concept de bodhisattva, c’est ne pas aller dans l’extinction avant la libération de tous les sentient being. Et donc je ne suis pas vraiment bouddhiste, mais ça, c’est une manière qui a été clairement exprimée dans la tradition bouddhiste, voila. 

Session présentée par :

Non2

Remerciements :

Homer, Atome (https://www.youtube.com/@atome.systeme), Rachid