Sage et Indigo discutent ensemble de leur parcours queer avant et après la découverte de leur multiplicité.
Mention de transphobie/incompréhension des identité de genre, et bruits de vent en arrière-plan.
Transcription:
Indigo (I) : Bonjour. Sage (S) : Bonjour. I : Alors je propose pour se présenter, on commence par donner les infos qu’on veut et ce serait bien d’y ajouter le ou les sigles LGBT avec lesquels tu te présentes aux personnes qui savent pas que tu es multiple. S : D’accord. Ok, par rapport au thème et tout ça. Oui, d’accord. S : Donc moi je suis le système Sage, le corps à 20 ans. On est un système d’une bonne dizaine, quinzaine d’alters. J’aime beaucoup dessiner, la musique et les oiseaux. Et donc c’est la première fois, c’est la première année que je fais une intervention, en duo ou pas, sur la Plural Positivity World Conference. Donc voilà. Et puis en général, quand je dois, si je devais entièrement, sans prendre en compte la multiplicité, me définir en tant que personne LGBT, c’est que déjà je suis bisexuelle, asexuelle, demi-romantique, et genderfluid. C’est beaucoup de, c’est beaucoup d’identités et tout ça. I : C’est pas grave. Mais on y reviendra plus tard. Moi c’est- je fais partie du système Indigo. On est un système de plus de 200 alters. On est donc partenaire du système Sage. J’aime beaucoup le dessin aussi. J’aime beaucoup Stardew Valley, des choses comme ça. Et souvent quand je dois donner un sigle LGBT aux gens qui savent pas que je suis multiple, ça va être soit queer, pour faire plus simple, soit homme trans et aro ace. Voilà, voilà. S : Annonce des potentiels trigger warnings pour cette vidéo. Dans la deuxième partie, celle sur le genre, il y aura quelques mentions rapides et implicites de transphobie et de manque d’éducation sur le sujet. Et pour ceux qui sont sensibles au bruit il est possible parfois d’entendre du vent très bas en arrière plan, parce qu’il y avait beaucoup de vent pendant l’enregistrement et même avec le montage il peut en rester, voilà voilà, bonne vidéo ! I : Je vais te demander, Sage, quel est ton parcours queer ? Dans le sens où est-ce que tu as découvert ta multiplicité avant de savoir que t’étais queer, ou ça s’est fait dans l’autre sens ? S : Non, ça s’est fait dans l’autre sens en fait, parce que j’ai commencé à réfléchir à ma sexualité et mon orientation romantique quand j’avais 13-14 ans, alors que ma multiplicité, j’en ai pris conscience à 18 ans, quelque chose comme ça. Donc il y a une petite marge. Donc j’ai d’abord pris conscience et réfléchi à mon identité queer avant d’y réfléchir à mon identité multiple. I : Moi c’est à peu près pareil, c’est-à-dire que j’ai découvert que j’étais multiple vers 18 ans aussi, 19 ans, et j’ai commencé à me poser des questions sur mon orientation sexuelle lorsque j’en avais 14. J’ai commencé à me poser des questions, mais très vagues, et on va dire que les vraies questions et les premières identités, les premiers sigles LGBT auxquels je me suis identifiée, datent de mes 15 ans à peu près. S : Ok. I : On va d’abord parler de la sexualité, et du coup, toi, tu t’es posé des questions d’abord sur la sexualité ou le genre ? S : D’abord sur la sexualité, c’est-à-dire qu’en fait, à un moment, je me suis dit “Eh, mais les mecs, d’accord, mais les femmes aussi”. Et du coup, en fait, assez rapidement, j’ai compris que j’étais bi. I : Tu t’es directement identifiée comme bi, ou t’as eu des phases où tu t’es dit, peut-être que je suis lesbienne, peut-être pas ? S : En fait, je suis une bisexuelle chaotique, c’est-à-dire qu’en fait, je suis passée par des phases, en fait, non, je suis hétéro, mais non, je suis bi, mais non, je suis lesbienne, mais non, je suis bi, mais c’est pas possible, je dois être hétéro, et en fait, ça a un peu fluctué pendant plein de mois, avant que vraiment je me dise Ouais, je suis bi, et c’est tout. Et je cherche, enfin, à ce niveau-là, j’ai pas forcément beaucoup cherché. Ça a plus été au niveau de la sexualité, en fait, que j’ai galéré, parce que je me disais, enfin, j’ai fait énormément de recherches par rapport, en fait, à mon orientation romantique et mon orientation sexuelle, parce que déjà, j’ai une définition en fait, mais les relations, pour moi, sont très très floues, parce que je suis neuro A, et c’est pas forcément toujours facile pour moi de savoir déjà si moi, je ressens quelque chose de platonique ou romantique envers quelqu’un, donc je me suis dit que si ça se trouve, en fait, je suis pas bi du tout, et je suis juste Aroace, fin du débat, et c’est tout. Donc ça a été un peu un parcours, en fait, de réfléchir et de bien définir mon orientation romantique, mon orientation sexuelle. Maintenant, je sais que je suis, sur le spectre, Aroace, donc sans doute demi-romantique et asexuel, mais toujours un peu bi, mais ça c’est vraiment à l’échelle individuelle, entre guillemets, sans forcément compter alter par alter. S : Petit guide des sexualités, des orientations différentes, qu’on aborde dans toute la vidéo, comme ça, ça permet d’être un petit peu plus clair. Selon SOS Homophobie, la bisexualité, c’est quelqu’un, c’est quand on peut avoir du désir ou éprouver des sentiments amoureux pour des personnes de toute identité de genre. On peut utiliser l’abréviation bi, parce que c’est plus rapide, et donc voilà, on utilise ce petit drapeau le plus communément. I : L’aromantisme, c’est une orientation romantique qui consiste à éprouver peu ou pas d’attirance romantique, quel que soit le sexe ou le genre de la personne. Et c’est une définition de wikipédia pour le coup, car SOS Homophobie n’avait pas de définition pour la romantisme. S : L’asexualité, quant à elle, c’est une orientation sexuelle qui se définit par une absence de désirs sexuels. Donc les personnes asexuelles, qu’on peut aussi appeler personnes ace, n’ont que peu d’intérêt pour les relations sexuelles. Elles sont davantage attirées sur un plan sentimental ou alors juste platonique. I : L’asexualité comme l’aromantisme sont des spectres, et du coup il existe plusieurs termes à l’intérieur du terme asexualité et à l’intérieur du terme aromantique. Par exemple, le terme demi-ace, qui veut dire qu’on ressent de l’attirance sexuelle uniquement si on connaît la personne, et demi-romantique, qui signifie qu’on ne ressent de l’attirance romantique que si on connaît la personne. Il y a aussi le terme aro-ace, qui est une fusion des termes aromantique et asexuel, pour aller plus vite si on est les deux à la fois. I : Donc pour ma part, en fait, les deux questions se sont plutôt… En fait, elles sont arrivées en même temps, c’est-à-dire que j’étais en troisième et j’ai commencé à regarder des vidéos à la fois sur le genre et à la fois sur la sexualité. Sachant que pour autant, la sexualité, je me disais peut-être que c’est ça, mais peut-être pas, et c’était compliqué. Autant le genre, je regardais toutes les vidéos possibles, j’ai même regardé une vidéo de 30 minutes sur les packers à l’époque, et pourtant, ça me venait pas à l’idée que peut-être si j’étais si intéressée que ça par toutes les étapes de la transition, c’est peut-être que j’étais concernée. C’était pas du tout dans mon esprit à ce moment-là, mais en fait, je pense que c’était pas dans l’esprit de l’hôte, mais que derrière, avec le recul, ça devait être dans l’esprit de quelqu’un, parce que c’est pas possible d’autant s’intéresser au sujet sans se dire peut-être que je suis concerné. Donc, je pense que le questionnement était là, mais qu’il était très enfoui, en fait. Et pour ce qui est de ma sexualité, moi, ça n’a pas du tout été dans le direct, c’est-à-dire que je me suis dit peut-être que j’aime les filles, donc peut-être que je suis bi, puis après, j’ai fait un coming-out lesbien, puis un coming-out bi… S : Un dé-coming-out ! I : … Puis un coming-out lesbien, puis un coming-out bi,puis un coming-out bi, puis je me suis dit peut-être que je suis pan, en fait, et ça a été très… En fait, ça a été constamment en mouvement, parce que j’arrivais pas à me fixer sur une sexualité précise, et à côté de ça, je comprenais pas exactement non plus ce qu’était une relation romantique, bah du coup, c’était compliqué aussi de me fixer sur qui est-ce que j’aimais, parce que c’était compliqué de différencier, par exemple, tes relations amicales de relations amoureuses. Et du coup, je savais pas trop, tout était extrêmement flou, et j’essayais absolument de m’accrocher à une étiquette, et c’était compliqué. S : Il y a aussi, en fait, quand tu prends en compte avec du recul, le fait que il y a de la multiplicité, et que le fait que ça change à H24, c’est aussi par rapport à qui au front, enfin en tout cas pour nous, on se rend compte maintenant qu’il y a peut-être aussi de ça. I : Oui, bah d’ailleurs, ça tombe bien, tu m’as fait une excellente transition… S : Oh la perche ! I : …car nous allons aborder de… Et maintenant que tu sais que tu es multiple, qu’est-ce qui a changé au niveau de ta définition de la sexualité, par exemple ? S : Moi, alors ça… Ça a changé, mais pas autant que je l’imaginais, c’est-à-dire qu’en fait, une bonne partie des alters sont aussi bi, c’est juste que selon les alters, il y a des préférences, et encore une fois, c’est très très difficile, en fait, pour nous de mettre un doigt exactement sur qu’est-ce que c’est que de l’attraction romantique, ou de l’attraction sexuelle, même si l’attraction sexuelle, elle est vraiment très très rare, on a quelques alters qui en ont, mais ils sont une minorité, majoritairement, on est vraiment tous ace, c’est l’abréviation de asexuel, alors que l’aromantisme, ça fluctue vraiment, selon les alters aussi, donc il y a des alters qui sont juste platoniques, alors qu’il y a des alters qui sont vraiment bi-romantiques, quasiment aucun aromantisme, ça fluctue vraiment au niveau de l’identité, mais comme on a découvert notre système, notre multiplicité, récemment, entre guillemets, c’est-à-dire il y a un peu plus d’un an, mais quand même récemment, on n’a pas encore, et peut-être que c’est aussi les alters qui n’en ressemblent pas besoin, mais on n’a pas vraiment mis une étiquette par alter, en mode tel alter est gay, est bi, est asexuel, tout ça, c’est vraiment toujours flou, et on n’a pas forcément cherché à faire de mapping sur le sujet. Et pour toi ? I : Pour moi, je me retrouve beaucoup, dans ce que tu dis, par rapport au fait de ne pas mettre d’étiquette, c’est quelque chose qu’on se cherchait absolument à faire au début, parce que les étiquettes, c’est très rassurant, et plus on a découvert le système, plus on s’est rendu compte que, de toute façon, les étiquettes pensées pour les singlets n’allaient pas fonctionner sur nous, parce que la façon de fonctionner est trop différente, et on s’est vu notre nombre aussi, ça allait être très difficile d’aller trouver chaque personne, soit parler quand on fronte, soit plonger dans les fin fonds de l’inner pour trouver chaque personne, et leur dire, c’est quoi ton genre, et c’est quoi ta sexualité ? Déjà parce qu’il y a des alters qui ne sont pas à l’aise de le partager, et c’est tout à fait ok, il y a des alters qui ne savent pas, et il y a des alters qui s’en foutent. Donc voilà, en fait, ce qu’on a fait, c’est, on a un compte Simply Plural, et sur Simply Plural, pour la sexualité comme le genre d’ailleurs, mais on en reparlera plus tard, on a laissé une case en mode tu peux décrire ta sexualité, et il n’y a pas de limite de mots, il n’y a pas d’obligation de mettre un terme précis, c’est juste, tu la décris comme tu veux, si tu as envie de la décrire, si tu n’as pas envie de la décrire, tu remplis pas la case, quoi. Et du coup, ça permet que chacun ait ses mots à lui, pour décrire ce qu’il ressent, et ce qu’il perçoit. Après, c’est vrai que dans la majorité du secteur (rires), après, il est vrai que dans la majorité du système, l’attraction romantique n’est pas ce qu’on peut appeler le plus présent. Je sais pas si c’est à cause des traumas, ou si c’est juste qu’on est particulièrement peu attirés romantiquement,mais c’est vraiment, on s’est rendu compte qu’il y avait, dans les altères qu’ils front souvent, il y en avait peut-être trois qui étaient intéressés romantiquement, et les autres suivaient le mouvement parce que c’était attaché à la personne, mais n’étaient pas investis romantiquement. J’ai beaucoup dit romantiquement. Du coup, c’est de là qu’est venue l’idée de se présenter comme aroace, parce que, j’ai pas beaucoup parlé de la sexualité, mais la majorité du système est ace également, pour ceux qui souhaitent se définir. À notre connaissance, on n’a que quatre ou cinq altères qui ne sont pas ace. S : Et ils se repèrent très facilement ? I : Pas forcément. Il y en a, tu seras surpris. Et du coup, l’identité aroace semblait celle qui semblait la plus accurate pour notre système. Après, on se laisse une marge où on se dit, au pire, si jamais, enfin, pour le coup, on est ensemble, mais avant qu’on soit ensemble, on se laissait une marge en se disant si jamais on rencontre quelqu’un qui nous plaît, on peut toujours expliquer qu’on se définit comme aroace, mais qu’il y a des petites subtilités et qu’on peut quand même avoir des sentiments romantiques parfois. Il y a toujours moyen, en fait, d’expliquer un peu plus et de… S : Il aurait fallu m’expliquer ça pendant la période où j’avais un crush sur vous, parce que je pensais que ce n’était pas possible haha. I : Oui, voilà, mais la communication, à ce moment-là, n’était pas le maître mot. S : Exactement. I : Est-ce qu’il y a eu des problèmes particuliers par rapport à la sexualité dans votre dans votre système ? Par exemple, je ne sais pas, un alter qui était sexuellement actif, qui voulait faire certaines choses et d’autres… Et qui mettait les autres mal à l’aise, par exemple, oui. S : Non, je ne crois pas. Comme ça, je réfléchis. Mais on n’a jamais eu de problème, entre guillemets, par rapport à la sexualité. C’est juste qu’on a tous des préférences, entre guillemets, différentes. Donc, il peut y avoir un alter en mode, hum, telle personne, et les autres alter en mode, qu’est-ce que tu nous racontes ?Et… Mais à part ça, enfin, il n’y a rien de spécial. Et en termes de sexualité et de relations intrasystèmes, on n’a pas d’alters en couple. Donc, à ce niveau-là non plus, en fait, il n’y a pas grand-chose non plus. I : Nous, on a des alters en couple intrasystèmes. On n’en a pas beaucoup, mais on en a. S : Et ils sont trop mimis. I : Et, du coup, ça a été une discussion qu’on a eue, en fait, par rapport à ces alters-là, de savoir comment interagir avec eux. Mais, en fait, c’est très libre, en fait, parce que… Dans notre relation, en tout cas. Hum… Dans le sens où… Hum… Quand un alter front, s’il veut faire… Si elle veut faire quelque chose et que… Il y a là votre consentement, c’est ok et il n’y a pas besoin pour autant que cet alter se définisse particulièrement en couple avec vous ou pas. Et pour le coup, on est tous assez polyA,polyamoureux. En tout cas, comme on a du mal vraiment, pour la plupart d’entre nous, à délimiter l’amitié et le romantisme, le polyamore nous semble la solution la plus simple pour éviter d’avoir à placer un mot sur toutes nos relations en fait. S : Compréhensible. I : Et du coup, les alters qui sont en couple et qui front sont dans cette situation là. Et du coup, ils agissent comme ils ont envie, dans la limite du consentement. S : C’est ça, voilà. Pour moi, du moment que les alters sont consentants et que ce n’est pas un little aussi, pour des raisons évidentes, il n’y a pas de problème. I : Voilà, c’est ça. I : Deuxième petit point de définition avec, et nous commençons par la transidentité. La transidentité ou les personnes transgenres sont des personnes dont l’identité de genre, féminine, masculine ou non-binaire, ne correspond pas à son sexe biologique assigné à la naissance, masculin ou féminin. Une personne qui n’est pas trans est une personne cisgenre. S : Toujours selon les définitions de SOS homophobie, une personne non-binaire c’est quelqu’un qui ne se reconnaît ni exclusivement dans le genre féminin et ni exclusivement dans le genre masculin ou dans vraiment aucun des deux. Donc en général, ça regroupe une multitude d’identités de genre, donc agenre, genderfluid, bigenre, etc. I : La genderfluidité est un terme qui est compris dans la non-binarité et qui désigne une identité de genre qui a la caractéristique d’être évolutive. Ça signifie qu’une personne s’identifie au-delà de l’identité de genre et peut se sentir parfois homme, parfois femme, parfois un mélange des deux. Son identité de genre est donc fluctuante et flexible. S : Et enfin, les personnes agenres, ce sont des gens qui ne se définissent dans aucun genre. Donc les personnes agenres vont rejeter entièrement ou partiellement l’idée même du genre et ressentent une absence totale ou partielle de genre. I : Et c’est aussi sur le parapluie non-binaire. I : On va aborder la partie du genre. Est-ce que tu t’es posé des questions sur ton genre avant la découverte de la multiplicité ? S : Aussi. Autant la sexualité c’est arrivé rapidement, c’est-à-dire en un an c’était fait, on avait tout bien géré, autant le genre s’est vraiment arrivé petit à petit tel une graine qui germe et qui pousse peu à peu. C’est-à-dire qu’en fait vraiment le tout début, c’est quand un ami de collège à moi a fait son coming out trans de son côté et que de manière complètement aléatoire, notre mère nous avait dit et toi tu serais trans aussi, mais pas méchamment, mais juste par curiosité parce que comme notre mère avait vu qu’on était très heureux pour cette personne, elle s’est dit peut-être que… Et à ce moment-là on avait dit non, enfin non. Et à ce moment-là on a commencé à réfléchir, à se poser beaucoup de questions parce que ça a été très compliqué parce qu’on se mettait pas dans une case masculine ni dans une case féminine. Donc très rapidement on s’est dit on n’est pas binaire. Mais c’était compliqué parce que ça changeait tout le temps. Et c’est-à-dire qu’autant on savait qu’on n’était pas binaire, mais si on voit un peu ça comme un curseur sur une ligne, le curseur se déplaçait en permanence, ce qui avec du recul était aussi influencé par les alters qui front. Mais même chaque haltère en soi, ça fluctue tout le temps. Donc en fait très rapidement on a commencé à réfléchir au concept. Quand on a pensé à ça, on s’est dit genderfluide peut-être. Et on a un peu douté parce que la genderfluidité c’est pas quelque chose qui est encore très documenté ou connu ou normalisé. Il y a encore pas mal de boulot à ce niveau-là. Donc ça nous a pris pas mal de recherches et de réflexions. Mais au final on s’est dit qu’on est genderfluid. Et après qu’on ait découvert notre multiplicité, on s’est dit peut-être qu’on n’est pas genderfluid, mais que c’est chaque alter. Et en réfléchissant, on s’est dit qu’une bonne partie des alters eux-mêmes sont genderfluid individuellement. I : Et du coup, il y a des alters qui veulent transitionner par exemple ? S : Il y en a qui voudraient un binder, mais pas forcément une transition médicale. On a hésité à prendre des hormones pour au moins avoir une apparence plus masculine. Parce qu’on a été assigné femme à la naissance et donc on s’est dit peut-être prendre un peu de testostérone. Mais au final, pas spécialement. Parce que nous-mêmes on modifie entre guillemets notre voix qu’elle soit plus ou moins aiguë. Et on a passé tellement d’années aussi à construire à côté de ça musicalement pour chanter. On s’est dit, si on doit tout reprendre après avoir pris de la T (= testostérone), flemme en fait. I : D’accord. S : J’aime bien la justification. Pourquoi tu prends pas de T ? Oh, flemme ! Mais on s’est dit qu’en tout cas, si jamais un jour on fait une transition plus… comment dire… Transition sociale est un peu déjà faite parce que la plupart de mes proches savent que mon genre est pas binaire et que ça fluctue. Autant une transition médicale ou hormonale, si ça arrive ce sera vraiment pas grand chose je pense. I : D’accord. S : Et pour toi ? I : Du coup, nous de notre côté, on s’est posé beaucoup de questions sur la transidentité. Mais disons que les vraies questions sont arrivées plus tard. Elles sont arrivées vers plutôt nos 17 ans, on va dire. Et contrairement à la sexualité où on n’arrêtait pas de changer d’avis, ça a été assez linéaire pour la transidentité. C’est-à-dire que quand on a découvert qu’on était possiblement trans, c’était un peu évident en fait. C’est-à-dire qu’avant, même depuis notre enfance, on disait souvent « Ah, si j’avais un physique plus androgyne, j’aurais peut-être transitionné ». Et jusqu’au jour où on nous a fait remarquer que l’envie, le sentiment d’être homme ou femme ou aucun des deux, c’est quelque chose qui ne dépend pas du physique. S : Et c’est très vrai. I : C’était extrêmement vrai. Et du coup, comme c’est quelque chose qu’on se disait vraiment depuis des années et des années, ça n’a pas posé beaucoup de problèmes au niveau de notre acceptance à nous. Ensuite, un peu avant la découverte vraiment officielle du système, on sentait qu’on était plusieurs. D’une certaine façon, on n’avait pas conscience que ce qu’on était. Et on avait conscience des voix. Et voilà, des voix. Et du coup, notre perception de genre fluctuait beaucoup. Et on s’est dit « Ah ben si ça se trouve, nous sommes non-binaires ». Parce que ça semblait être la chose la plus logique. Enfin, c’était plus logique pour nous de se dire « Ah, je suis non-binaire plutôt que peut-être j’ai d’autres personnes dans ma tête qui ont des genres différents du mien ». C’est forcément… Voilà. Et du coup, on a commencé à se poser des questions. Mais c’était toujours dans l’idée qu’on se percevait du côté masculin du spectre. Donc ça a été… Ensuite, on s’est définis auprès de nos amis les plus proches comme plus demi-boy ou genderfaun. Petit topo sur ce que sont demi-boy et genderphone. Voilà. S : Et j’ai oublié d’enregistrer ces définitions là avec les autres, donc je le fais un petit peu après. Une personne demiboy, c’est quelqu’un qui se reconnaît à la fois dans un genre masculin et un genre neutre. I : Et une personne genderfaun, c’est une personne qui est fluide de genre mais qui ne va jamais dans le cote féminin du spectre du genre. I : Et ensuite, on a découvert notre système. Et là, en fait, on a comme qui dirait un peu abandonné l’idée de définir notre genre. Non, parce que c’est particulier quand même dans notre système. Enfin, c’est particulier. Non, c’est pas particulier. C’est… Enfin, disons qu’une personne qui a très peu connaissance des identités non-binaires se poserait des questions. Parce qu’on a essayé de voir quel était le genre majoritaire dans notre système pour savoir si on faisait quand même une transition ou pas. Mais disons qu’on a eu beaucoup de réponses qui étaient de l’ordre de « je comprends pas ce que c’est le genre », « je me genre avec un… » Enfin, « j’arrive pas à me genrer avec les termes non-binaires », ou alors, en fait, « me genrer pas ». Même… Et je me souviens, c’était avec Jazz, cette discussion. S : Oui. I : Jazz me disait… Donc, Jazz, c’est… Jazz est un alter du système. Et Jazz me disait « oui, me genrez pas ». Et je lui ai fait « donc, tu es agenre ». Et Jazz m’a dit « non, parce que me définir comme un genre, c’est déjà d’une certaine façon me genrer. Moi, je ne veux pas être genré ». Et du coup, je lui ai demandé quel pronom Jazz utilisait. Et Jazz m’a dit « au possible, me donnez pas de pronom ». Jazz, c’est Jazz. S : C’est Jazz. C’est le Meep, en fait. I : Haha. On a eu ce genre de réaction. On a eu… On a essayé aussi de définir un peu ou de demander à des littles. Et on a eu des réponses assez mignonnes. Je pense notamment à Ponyo, qui nous a dit « c’est quoi le genre ? ». Et on a essayé de lui dire que c’est la façon dont elle se sentait à l’intérieur d’elle-même. Est-ce qu’elle s’identifiait plus à une fille, à un garçon ou peut-être à autre chose ? Et elle nous a regardé dans les yeux. Elle a dit « moi, je suis un poisson ». S : C’était adorable. I : C’était adorable. Et on a eu beaucoup ce genre de réponses de la part des plus jeunes, qui ont tendance à associer leur genre plus à un objet ou à un animal qu’à un genre vraiment défini. Et du coup, on s’est demandé à un moment si on allait transitionner quand même. Et au final, on s’est dit qu’on allait quand même transitionner. Au moins pour prendre des hormones, parce que la plupart d’entre nous ont une voix masculine. La voix nous rend assez dysphorique, la voix du corps. Après, qu’est-ce qu’on a d’autre à dire sur le genre ? On a eu des rôles qui sont apparus avec un genre très lié au rôle. Par exemple, je m’appelle Réal et je suis en charge de tout ce qui est aspect transition et expliquer mon genre à des professionnels de santé. Enfin, expliquer le genre du corps à des professionnels de santé. Par exemple, mon rôle est complètement lié au fait qu’on soit trans. Enfin, au fait qu’on transitionne en tout cas. Et on a découvert un alter récemment qui s’appelle Mittens. Et en fait, on a découvert que cet alter avait un genre qui dépendait de sa santé mentale. C’est-à-dire que c’est un alter trauma older et quand il est trigger par les traumas, il a un genre féminin. Je ne sais pas comment l’expliquer avec d’autres mots, donc je fais comme ça sort, j’espère que ça ne blessera personne. Mais il a un genre féminin et quand il va mieux, quand il est plus dans une… quand il fronte pour d’autres choses qu’un trigger négatif, il a plus un genre masculin. Et c’est pas soit tout féminin, soit tout masculin. Il y a des… c’est comme un spectre en fait. S : Oui, c’est ça, c’est le curseur. I : Ouais, c’est un curseur. Et du coup, voilà, donc le genre dans notre système est assez perdu. Et c’est pour ça que soit on dit qu’on est queer parce que ça évite d’expliquer tout ça, qui prend quand même du temps à expliquer. Soit on dit qu’on est un mec trans parce que ce qu’on a expérimenté face à beaucoup de gens, c’est que la transidentité binaire est beaucoup plus comprise que la non-binarité. Et donc c’est plus facile à des gens qui notamment connaissent pas grand chose sur les sigles LGBT et tout ça, de dire qu’on est un mec trans. Parce qu’ils vont plus visualiser ce que c’est, plus que la non-binarité. Et comme on utilise des pronoms masculins, on utilise les pronoms ils-lui, ça dérange pas trop qu’ils nous perçoivent plus masculin qu’on ne l’est quoi. Parce que c’est de toute façon des gens avec qui on n’a pas trop d’atomes crochus quoi. I : Voilà, je pense qu’on a tout dit. S : Ok, en tout cas c’était un plaisir de pouvoir enregistrer notre témoignage par rapport à nos identités romantiques, sexuelles et nos identités de genre. Surtout pour cet événement, quand même qu’il y a un événement qu’on suit depuis plusieurs années, la pression est présente. I :Je sais pas si ça va être intéressant, j’ai peur que ce soit pas intéressant. S : Pour moi ça devrait l’être. I : Ok, ben en espérant vous avoir pu aider des gens, peut-être ou pas. S : C’est ça. Et rappelez-vous que de toute façon, peu importe comment vous vous identifiez, que ce soit une identité bien précise avec beaucoup d’étiquettes ou quelque chose de beaucoup plus vague où vous voulez pas forcément vous prononcer, dans tous les cas ce sera toujours valide et légitime et vous serez toujours tous très très cool. I : Et aussi si vous avez pas envie d’utiliser d’étiquettes, n’utilisez pas d’étiquettes. Et si vous avez envie de quand même avoir une étiquette pour vous présenter aux autres parce que c’est plus facile, vous êtes pas obligé de correspondre à 100% à la définition, c’est pas très grave. Oui. Je sais qu’il y a… De toute façon vous ferez de mal à personne. S : Je sais qu’il y a beaucoup de débats en ligne en mode est-ce que telle personne correspond à telle étiquette et tout ça, mais… Mais en fait c’est pas si… I : En fait le problème c’est qu’on ne peut pas correspondre à 100% à mon avis à une étiquette. Enfin il doit bien y avoir des personnes pour lesquelles c’est le cas, mais je pense pas que ce soit la majorité parce que c’est trop précis comme critère. Et quelque part notre façon d’être en tant qu’humain fait qu’on ne peut pas avoir de choses précises. L’humain n’est pas précis en fait. Donc c’est pas grave de pas cocher toutes les cases d’une étiquette même si vous l’utilisez. S : Voilà. I : Et bon courage si vous êtes en questionnement et vous inquiétez pas, on vous accepte comme vous êtes de toute façon. S : C’est ça. Et en tout cas c’était un plaisir de participer. J’espère que la qualité de son n’est pas trop mauvaise et qu’on entend pas trop le vent à l’arrière. I : J’espère que j’ai pas trop fait de bruit en triturant absolument tout ce qu’il y a autour de moi. Et en tout cas on vous souhaite une bonne soirée ou journée selon l’heure de diffusion. Et on se retrouve de toute façon après cette vidéo pour les questions. S : Bye! I : Bye !
Intervention proposée par:
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Sage (Iels/tous les pronoms | Multiple): « Je suis une personne multiple, autiste et TDAH qui aime l’art et les oiseaux. »
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Indigo (Il | Multiple): « Je m’appelle Indigo, mon corps a 22 ans, j’aime dessiner et jouer à Stardew Valley. »
Information : la Plural Positivity World Conference est mentionnée dans cette vidéo car elle devait, à l’origine, être diffusée lors de l’édition francophone 2025 de cet évènement. Celle-ci ayant été annulée peu avant sa diffusion, c’est finalement Kaléidoscope, diversité du spectre multiple qui a pris le relais et assuré la diffusion.